COUPLE 6 : ISHIOKA RENA & SATO TAISUKE

On les envoyait à la plage ? Voilà un moment que Rena n’y était plus allée. L’idée de devoir accompagner un enfant la dérangeait davantage, mais c’était une façon comme une autre de passer le temps, sans oublier la situation délicate dans laquelle elle se trouvait. Il lui fallait trouver des études, à la demande de Taisuke. Des études ! Elle qui s’était, depuis quelques années, reposée sur le confort dont on la laissait profiter ? L’idée était stupide, totalement absurde, mais si elle voulait encore compter sur l’aide de son élu, elle avait tout intérêt à trouver quelque chose. Elle devait faire le deuil de l’indépendance qu’elle chérissait tant. Si elle ne le faisait pas, Taisuke s’en irait et elle se retrouverait totalement seule.

Près de la plage, Rena adressa un sourire à l’organisateur qui remettait les papiers à Taisuke. Elle aussi était majeure, elle aurait pu s’en charger. Cependant, elle n’en dit rien et se tourna vers le jeune garçon qui venait de les saluer. « Bonjour Satoshi, je m’appelle Rena. On a hâte aussi !  » Si elle n’appréciait pas forcément les enfants, travailler dans une boutique de bonbons lui avait appris à y faire avec eux, par la force des choses. « Tu as quel âge, dis-moi ? » Elle posa rapidement les yeux sur Taisuke, espérant qu’il en avait terminé avec la paperasse, et fit glisser ses lunettes de soleil sur le haut de son crâne. Retrouver ses tenues d’été dans son dressing avait été un véritable jeu d’enfant. Par chance, elle possédait encore quelques tenues de l’année précédente, jamais portées. Ce n’était pas la dernière mode, mais elle pouvait y survivre. Au moins un peu.

Une journée complète avec un enfant. Taisuke ne le sentait pas. Il ne s’était jamais occupé d’enfant et, aussi loin qu’il se souvienne, il n’en avait jamais fréquenté. Enfin, sauf quand il était lui-même enfant mais un enfant Nord-Coréen, ce n’était pas pareil. Les petits Japonais étaient forcément bizarres. Il ne comprenait pas vraiment ce qu’ils allaient pouvoir faire sur une plage avec un enfant, mais il ne comprenait pas vraiment le concept de cette journée non plus. Néanmoins, ils faisaient partis de ces couples difficiles, alors il fallait bien montrer pattes blanches et un peu de bonne volonté.

Un bermuda et un polo enfilés, il devait au moins faire semblant d’être dans la vague été. Il était passé cherché Rena chez elle, se promettant de la laisser tranquille aujourd’hui. Ne pas demander si elle avait cherché du boulot, ne pas lui demander si elle avait trouvé des études qui pourraient l’intéresser. Il salua le petit garçon d’un hochement de tête en le voyant. Il était petit, assez mignon. Il prit les papiers qu’on lui remit, allant rapidement les compléter avant de les rendre, revenant près de Rena pour sourire au petit. Il ne savait pas vraiment quoi lui dire, la journée risquait d’être horriblement longue.

Il avait l’air d’aimer parler. Rena sourit en entendant les commentaires qu’il faisait. Ouais, un très grand âge, sept ans. Il ne pouvait rien faire seul. Quand elle songeait à ses sept ans, Rena ne voyait rien de plus que sa mère, attablée dans le salon, qui essayait de s’en sortir sans aide avec ses factures et ses autres problèmes. Tout ça parce qu’elle avait cru en un homme qui l’avait laissée tomber. Grandir ne l’avait pourtant pas rendu plus heureuse, à en voir la situation. « C’est vrai, c’est très grand ! » Elle souriait encore. Elle ne devait pas faire de faux-pas aujourd’hui, ne pas tout ruiner. C’était difficile, prendre sur soi, se maîtriser. Bien plus que lorsqu’elle l’avait décidé elle-même.

La question du petit lui fit relever les yeux vers Taisuke qui n’avait toujours pas dit un mot. Son amoureux. C’était compliqué, mais elle ne pouvait l’expliquer à ce gamin, il ne comprendrait pas. Les enfants sont trop stupides pour ça. « Il est timide, c’est pour ça. » Elle hocha ensuite la tête, souriant largement. « Mais il est très gentil, ne t’en fais pas. » Trop gentil. Un peu stupide aussi, pour son plus grand bonheur. N’importe quel homme aurait refusé de l’aider encore et l’aurait mise à la rue. « Tu peux m’appeler Rena, lui c’est Taisuke. » Elle se redressa ensuite, posant les yeux sur ce dernier. « Tu vois endroit où on pourrait s’installer ? »